Székely György: Le passage a l'economie bassée sur la corvée en Europe centrale et orientale et l'année 1514 - Studia historica Academiae Scientiarum Hungaricae 98. (Budapest, 1975)

Une étape connue de la vengeance seigneuriale succédant à la guerre paysanne de Dózsa fut la législation établie par la diète hongroise qui s’ouvrit le 18 octobre 1514. A cette assemblée qui dura plus d’un mois, les représen­tants de la noblesse passèrent en revue et régularisèrent une fois de plus la situation de la paysannerie après l’échec de sa révolte. Un article de la nou­velle loi fixait le taux des redevances sous forme de travaux.A ce propos, il est intéressant de renvoyer à une constatation d’István Szabó, notre grand historien, spécialiste de l’histoire de la paysannerie, qui dans l’ouvrage ré­sumant sa période bourgeoise écrit ceci: «les charges féodales ne différaient pas sensiblement des charges antérieures». Un jeune historien d’aujourd’hui, Gábor Barta affirme dans des termes très semblables que «la diète modifia à peine les charges directes des serfs». Cela vaut peut-être pour la structure des éléments constitutifs du système des charges, comme en Allemagne après 1525, mais non pour l’ensemble des charges. La loi confirma toutes les charges existantes des paysans, de plus, elle prévoyait — et mon avis rejoint celui de notre historiographie agraire et juridique plus ancienne — une corvée plus lourde (c’est aussi l’opinion de Gábor Barta), précisant que les serfs étaient tenus de servir leur seigneur une journée entière chaque semaine. Auparavant il n’existait aucun règlement de ce genre valable pour le pays entier, et la pratique des divers domaines n’atteignait pas non plus ce niveau. La nouvelle loi ne faisait pas encore de distinction entre corvée à attelage et corvée à bras, comme c’était la pratique en Allemagne où les seigneurs exi­geaient et comptaient séparément les deux types de corvées dès avant 1525. Au début du XVIe siècle cependant, les terres allodiales exploitées au moyen de la corvée et l’économie des réserves seigneuriales n’étaient ni assez développées ni assez généralisées en Hongrie pour que le nouveau dé­cret — pas plus que les autres prescriptions de la loi répressive — puisse être mis en pratique dans les grandes propriétés hongroises et imposé aux paysans qui s’y opposaient résolument. Il va de soi que la défaite infligée à la révolte armée ne signifiait nullement la fin de la résistance paysanne; en Allemagne aussi, les paysans soumis ne cessaient de se révolter contre les nouvelles corvées. On constate d’emblée qu’en Hongrie ce type d’exploitation agricole et le système des charges qui l’accom­pagnait — malgré le taux et les tendances décelés dans la loi de 1514 — restaient en arrière de la Pologne en ce qui concerne son état de développe­ment. L’interprétation de l’article de la loi et la loi elle-même comportent de nombreuses contradictions. Pour comprendre les circonstances politiques et psychologiques et pour mettre au jour les facteurs économiques agissant

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